Shunsuke Ohno et Dmitry Sokolenko "FRACTAL"
10 septembre 2011 — 27 octobre 2011
Paris

Pour sa première exposition rue Volta, RussianTeaRoom présente la série « Mandala » du japonais Shunsuke Ohno et un choix de pièces phares de l’œuvre du russe Dmitry Sokolenko. 

Dans cette exposition inaugurale, RussianTeaRoom présente le travail de deux artistes sur un concept fondamental de la photographie, la fractalité. Shunsuke Ohno et Dmitry Sokolenko proposent deux approches distinctes de ce même principe : frontale et figurative pour l’un, sémantique et abstraite pour l’autre. 

Une fractale désigne des objets dont la structure est invariante par changement d’échelle. Ce sont des objets gigognes en tout point, dans lesquels on peut distinguer le tout à l’intérieur du plus petit élément – comme par exemple dans les flocons de neige. 

RussianTeaRoom emprunte ce terme pour en faire une notion universelle, et ouvrir un débat sur la nature de la photographie. En effet, le principe fractal est observable dans presque n’importe quelle image : c’est la capacité de la photographie à d’une part, généraliser l’espace et le temps, et d’autre part, inciter le spectateur à se positionner par rapport à cet espace-temps. 

La série « Mandala » de Shunsuke Ohno

Dans sa série « Mandala », Shunsuke Ohno explore le principe de fractalité d’une manière frontale et figurative. Il met en évidence les similarités morphologiques entre le monde de l’infiniment grand et celui de l’infiniment petit. Tour à tour, nous survolons Tokyo, ses gratte-ciels, ses grandes artères, et nous plongeons au cœur du lichen qui se développe sur l’écorce des arbres et des feuilles.

Ces deux dimensions, « micro » et « macro », couvrent chacune une fraction de notre monde : petite et naturelle d’un côté, grande et construite par l’homme, de l’autre. 

Le terme « Mandala » désigne un symbole sacré, une représentation graphique de l'univers, utilisée dans le bouddhisme comme support à la méditation. Le méditant est censé intérioriser les forces de l'univers à travers les différents symboles représentés. 

« Mandala » est inspiré de l’un des fondements du bouddhisme selon lequel le monde est formé d’univers imbriqués les uns dans les autres, les petits dans les grands, assurant ainsi l’harmonie du tout. C’est le principe de l’interdépendance : chaque partie du cosmos dépend de tout le reste. Shunsuke Ohno explique : « Chaque partie porte en elle-même la totalité de l’Univers. Et parce que tout est interdépendant, rien n’existe en soi. Ce lien d’interdépendance n’est pas intrinsèque et peut être modifié selon l’interaction entre l’observateur et l’objet observé. Aussitôt qu’un phénomène est observé, il prend son existence. Le fait d’appréhender la réalité lui donne un sens. » 

Dans ses propos est contenu le mode opératoire de la photographie : aucun autre art ne le fait avec autant de responsabilité de démiurge. Du lichen qui prolifère sur les arbres aux lignes de la ville, dessinées par l’homme, tous deux en perpétuelle évolution, l’œil du spectateur va et vient entre deux dimensions. Saisi par les correspondances de ces lignes dans lesquelles la vie coule, fertile et pleine de promesses, on devine un écho à d’autres lignes, celles tracées dans le creux de nos mains. Un recueil à la japonaise.

Les Objets Photographiques de Dmitry Sokolenko

Le travail de Dmitry Sokolenko s’appuie lui aussi sur le principe de fractalité. 

Avec la prolifération des images, lorsqu’en fait, TOUT est image, nous pourrions dire que le pixel devient LA particule élémentaire visuelle. Comme la langue distingue l’être humain de l’animal, le pixel différencie l’être humain d’autrefois de celui d’aujourd’hui. Pour lier ces deux codes, à fois simples et complexes, du langage et de l’image, Dmitry Sokolenko invente et défend un nouveau code. 

Dmitry Sokolenko utilise la photographie pour emmener l'art abstrait à un autre niveau, celui du langage visuel. Il met en images le champ sémantique. Les titres reposent sur une connaissance commune au créateur et au spectateur, que l'artiste explore en profondeur pour en faire jaillir l’essence. L'image qui en résulte est la quintessence d'un phénomène, l'image qui contient la totalité de ce phénomène sémantique. Sokolenko codifie notre monde avec ses images, à la manière d’une table de Mendeleïev.

RussianTeaRoom a choisi de montrer des images « hors série » de l’œuvre de Dmitry Sokolenko représentant tour à tour des personnages, des concepts et des événements. 

Parmi les personnages au rendez-vous, le spectateur trouvera des noms de la culture de masse populaire - « John Lennon » et le piano blanc symbolique, « Paris Hilton » et le rejaillissement rose glamour - , des hommes ayant marqué les grandes découvertes - « Vasko de Gamma » et un fragment du tracé de la mappemonde, « Yuri Gagarine », véritable héros de l’Union soviétique - ou encore des figures religieuses - « Saint Sébastien » et ses entrailles transpercées par les flèches. D’autres photographies matérialisent des concepts – « Contraposto », principe né dans la sculpture grecque antique selon lequel le déséquilibre, et par extension le petit défaut, participe à la perfection de l’œuvre ; « Zeitgeist », association d’individus aspirant au changement intellectuel, moral et culturel de notre époque ; « The Gift », don de la nature, à la fois cadeau du ciel et fardeau. Enfin, Dmitry Sokolenko codifie des événements qui ont modifié l’ordre mondial, comme les attentats du World Trade Center, et des dates sanglantes de l’Histoire de la Russie à travers « 1917 » et « Stalingrad »